Anatomie, Sens et Comportement

Anatomie, Sens et Comportement



Qu'est-ce qui se cache sous la carapace ?
Comment voit, sent et entend une tortue ?
Comment réagissent les tortues ?






































































































































































































































































































































Qu'est-ce qui se cache sous la carapace ?

La forme particulière des tortues terrestres ne résulte pas d'un quelconque caprice de la nature, mais d'un processus de sélection étalé sur des centaines de millions d'années. Au cours de celui-ci, les porteurs de caractères - formes, couleurs, comportements - inadaptés tombaient victimes des prédateurs, tandis que ceux qui avaient survécu transmettaient les leurs à leur descendance.

La carapace si chargée de symboles saute aux yeux quelle que soit l'espèce, mais sa forme, sa coloration, sa rigidité et sa dureté varient d'une espèce à l'autre. Les tortues molles ont une carapace molle, les tortues luth une carapace en cuir, les kachugas une carapace en forme de toit, les tortues boueuses une carapace articulée. La carapace des tortues terrestres est généralement bombée, rigide et stable.
Ecailles cornées d'une Tortue Terrestre
Coupe longitudinale d'une Tortue Terrestre
Dorsière (à gauche)
1-5. vertébrales
6. nuchales
7. supracaudale
8-11. pleurales (ou costales)
12-22. Marginales
Plastron (à droite)
1. gulaire
2. humérale
3. pectorale
4. abdominale
5. fémorale
6. anale
1. vertèbres cervicales
2. ceinture scapulaire
3. plastron
4. bassin (ceinture pelvienne)
5. vertèbres caudales
6. vertèbres dorsales
7. dossière
La carapace est constituée d'une partie supérieure généralement bombée, la dossière, et d'une partie inférieure plate, le plastron. Dossière et plastron sont soudés sur les côtés par une arête osseuse. La carapace osseuse est composée de plaques d'os dermiques, soudées entre elles par des sutures. Elle est recouverte d'une carapace cornée dont les écailles ne se superposent pas aux plaques osseuses et sont en nombre différent, comme on le voit facilement chez une tortue morte, une fois que les écailles se détachent des plaques osseuses.

Au centre de la dossière, les plaques vertébrales sont soudées à la colonne vertébrale, tandis que les plaques pleurales (latérales) sont soudées aux côtes. Seules les vertèbres cervicales et caudales sont libres. La ceinture scapulaire (épaules) est également soudée à la carapace, et sa position particulière est unique chez les vertébrés.
Plastrons
Dossière
La peau recouverte d'écailles est caractéristique des reptiles

Chez les tortues terrestres, la peau des parties internes du corps s'est développée en vue de leur protection. Seules les parties du corps visibles lorsque l'animal est rentré dans sa carapace - tête, partie antérieure des pattes et queue - sont effectivement couvertes d'écailles cornées dures.
Lorsque ces parties sont étirées et dépassent largement de la carapace, on constate que les parties les plus internes - cou, base des pattes et racine de la queue - possèdent peu ou pas d'écailles et ont une peau relativement souple. Celle-ci accroît la mobilité de ces parties, qui ne sont pas exposées lorsque l'animal est rentré.
Chez les tortues, la respiration n'est pas assurée par un gonflement et une extension de la poitrine, car la carapace ne le permet pas. Au repos, les poumons sont remplis d'air, et l'expiration est due à une compression à laquelle participent aussi les pattes antérieures et la gorge.

Le coeur, les artères et les veines sont conformés de telle manière que le sang est un mélange de sang oxygéné et de sang riche en dioxyde de carbone, ce qui rend la température corporelle d'autant plus dépendante de la température ambiante.

L'estomac est petit et relativement peu extensible, ce qui limite les quantités ingérables en un seul repas. Le pancréas est petit, l'intestin grêle relativement court, ce qui signifie que les tortues ne peuvent digérer de grandes quantités de protéines. C'est avant tout le colon ou gros intestin qui s'est adapté à la nourriture disponible dans les différents habitats.
Coupe longitudinale anatomique d'une tortue femelle
     1. Foie                   2. Oviductes                     3. Poumons
     4. Coeur                5. Muscle du cou              6. Intestin

Comment voit, sent et entend une tortue ?

Les tortues se servent de leurs organes sensoriels pour rechercher leur nourriture, trouver des partenaires sexuels et s'orienter. Les tortues terrestres ont une bonne vue, et sont capables de distinguer les couleurs. Pour se nourrir, elles préfèrent le rouge, le vert et le jaune. Elle peuvent aussi repérer les prédateurs, les ombres ou les plantes nourricières à une dizaine de mètres et perçoivent très bien les mouvements.

Leur sens de l'odorat est également bien développé. Les particules odorantes sont perçues de loin par les narines. Il est probable que leur odorat leur fournisse de meilleures informations que la vue, car tous les objets intéressants - nourriture, sol, obstacles, congénères - sont flairés soigneusement. Les tortues peuvent percevoir les substances odorantes à de grandes distances, ce qui ne les empêche pas de flairer de près tout ce qui les entoure.

La perception de la chaleur (thermosensibilité) est bien développée. Incapable de réguler physiologiquement leur température corporelle, les tortues n'ont d'autre possibilité que de se déplacer pour maintenir leur corps entre 15 et 35°C, leur température d'activité. Par temps frais, elles s'exposent au soleil, s'installent sur des sols chauds ou se réfugient dans la  végétation épaisse, la litière du sol ou sous terre. S'il fait trop chaud, elles trouvent refuge à l'ombre, dans l'eau ou également sous terre. La température est perçue par des cellules spéciales, les thermorécepteurs. Répartis sur tout le corps, carapace comprise, ceux-ci sont particulièrement nombreux sur la tête et le nez ainsi que sous les pattes.

Le bon développement du goût est attesté par le fait, que souvent, un aliment déjà flairé n'est rejeté qu'après avoir été goûté par la langue.

En revanche, l'ouïe est moins bien développée. Les tortues possèdent des oreilles pourvues de tympans, mais leur perception est limitée aux basses fréquences. Mais les tortues sont très sensibles aux vibrations du sol. Le fait que, avant l'accouplement, beaucoup d'espèces émettent des sons, suggère que ceux-ci peuvent être perçus par le partenaire sexuel en l'occurrence.

Enfin le sens du toucher est limité par l'épaisseur de la peau et la présence d'écailles ; la sensibilité à la douleur est également moindre que celle des animaux à sang chaud. Toutefois il ne faut pas confondre une carapace de tortue avec un bouclier. Elle est irriguée par de nombreux vaisseaux sanguins, situés entre la carapace cornée et la carapace osseuse, et elle est plus sensible qu'on ne le croirait : par exemple, il suffit de caresser doucement la carapace avec le doigt pour réveiller la tortue.

Le repas de Mimi, Tortue d'Hermann de 2 ans
Cri d'un mâle tortue

Comment réagissent les tortues ?

Au cours de l'évolution, les tortues ont développé diverses stratégies de survie pour échapper aux prédateurs, effacer leurs traces ou éviter d'être repérées. Leur activité est essentiellement déterminée par les instincts inscrits dans leurs gènes. Ces instincts déterminent, à l'intérieur d'un cadre et d'un éventail de comportements précis, comment l'animal réagit à diverses stimulations, telles que la température, la lumière, l'humidité et autres perceptions sensorielles.

Les comportements instinctifs remplissent deux fonctions majeures : vivre aussi longtemps que possible - c'est l'instinct de survie - et transmettre ses gènes au plus grand nombre possible de descendants - c'est l'instinct reproducteur. Le bien-être (recherche de la bonne température corporelle), la défense, la fuite, la dissimulation ou la recherche de nourriture participent au premier ; le second inclut la recherche d'un partenaire, la parade nuptiale du mâle, l'accouplement et la ponte.

Dans la nature, le premier souci des animaux est la survie. Au cours de sa longue vie, une tortue s'expose à de nombreux dangers susceptibles de mettre sa santé et même sa vie en danger. Avant même de naître - dans l'oeuf, donc - les tortues sont exposées sans défense à une multitude de prédateurs. Dans les jours qui suivent la ponte, des mammifères tels que le renard, le raton laveur, les mustélidés, le blaireau ou le sanglier sont attirés vers le nid. Poutant la mère a creusé  un nid dans un lieu suffisament ensoleillé et l'a dissimulé à la vue. Mais elle a laissé des traces odorantes que seuls le soleil, le vent et la pluie effaceront avec le temps.

Le danger suivant menace les jeunes tortues dès la sortie de l'oeuf. Quand elles quittent le nid, elle laissent à leur tour des traces odorantes qui attirent à nouveau les prédateurs. Les jeunes, dont la carapace est encore molle et suffisament petite pour être saisie dans la gueule des carnivores, ont un comportement discret, se déplacent peu et vivent à couvert la plupart du temps. Avant toute chose, ne pas être découvert : telle est leur stratégie de survie, à laquelle concourent la forme et la coloration de la carapace. Pendant ce temps, les jeunes tortues ont une alimentation riche qui leur permet d'atteindre rapidement une taille et une dureté de carapace suffisante.

Enfin il faut échapper à d'autres dangers, comme les chutes, la noyade, le gel, l'hyperthermie, la faim ou l'égarement dans un environnement peu propice. Au moment de la ponte, les femelles sont particulièrement exposées, car pour pondre, elles recherchent souvent des lieux découverts, bien exposés au soleil (pour chauffer les oeufs) et offrant peu d'obstacles à la vue. La ponte elle-même les contraint à rester au même point pendant des heures, et c'est aussi un exercice exténuant. Néanmoins, les femelles possèdent des stratégies de défense, choisissant pour pondre des heures où les prédateurs sont au repos.
Mimi , se cachant dans les herbes
Une fois les oeufs pondus, la femelle les recouvre de terre

Comportement social et comportement reproducteur

Les tortues ne montrent pas de comportement territorial comparable à celui des mammifères ou des oiseaux (par exemple près du nid). Les tortues terrestres sont solitaires, elles ne possèdent pas de comportement social développé. En dehors de la période de reproduction, les rencontres sont généralement fortuites. Au mieux, les tortues se "saluent" d'un hochement de tête ou hument l'air en direction de l'autre, quand elles ne s'ignorent pas complètement. Il en va tout autrement à la saison des amours.

Rencontre mâle-mâle

Rencontre mâle-femelle

A la saison de amours, qui peut être décalée de plusieurs mois selon le climat, les mâles recherchent activement des femelles. A cette époque, ils se déplacent beaucoup. Quand ils rencontrent une autre tortue, ils vérifient - d'abord visuellement, puis à l'odeur - à quelle espèce et à quel sexe celle-ci appartient.
S'il sagit d'un mâle, notre tortue l'évite immédiatement ou l'affronte - cela varie d'une espèce à l'autre, mais aussi d'un individu à l'autre. Les rivaux se bousculent et se heurtent comme des cerfs, ou bien cherchent à intimider l'adversaire en le soulevant par le côté ou en le retournant sur le dos. Chez certaines espèces, les plaques gulaires du plastron des mâles sont dotées de prolongements destinés à faciliter ces manoeuvres.
Pour attaquer l'adversaire par le côté, les deux rivaux tournent l'un autour de l'autre, cherchant la position qui leur permettra de prendre le dessus. Parfois, l'un d'eux monte sur l'autre, qui, à son tour, tente de retourner la situation à son avantage par des mouvements de corps.
Lorsqu'un mâle rencontre une femelle de son espèce, celle-ci prend la fuite ou rentre dans sa carapace. Les poignets et les chevilles des tortues n'étant pas mobiles, le mâle ne peut pas maintenir sa partenaire. Même lorsqu'il est en position, prêt à l'accouplement, il suffit que la femelle avance de quelques pas pour qu'il se retrouve par terre.
Souvent, on reconnaît que la femelle est prête pour s'accoupler au fait qu'elle reste sur place et relève la croupe en s'appuyant sur les pattes postérieures. Mais, la plupart du temps, le mâle doit l'amadouer. Pour cela il se tourne vers elle, rentre la tête et heurte sa carapace en prenant appui sur ses pattes arrière. Le mâle cogne ainsi la femelle plusieurs fois de suite, puis court vers l'avant afin de prendre contact tête contre tête et lui mordre les pattes antérieures.
Dans les petits enclos, les mâles harcèlent parfois les femelles avec tant d'obstination que celles-ci ne peuvent plus se dégager. Dans ce cas, il vaut mieux séparer temporairement les animaux.

Rythmes d'activité journalière

L'activité des tortues terrestres dépend de plusieurs facteurs, en premier lieu de la température, de l'humidité atmosphérique et de leur habitat. La température d'activité idéale des tortues, animaux à sang "froid", est comprise entre 25 et 33 °C. C'est dans cette gamme de température que les sens et les organes des tortues sont les plus efficaces. Dans le Bassin Méditerranéen, ces températures optimales ne sont pas toujours atteintes. La nuit, le soleil ne brille pas, les températures sont plus basses et l'air est plus humide. En dessous de 20°C et au dessus de 35°C, les tortues doivent se protéger du froid ou de la chaleur. Ces animaux diurnes se cachent la nuit dans les buissons, les souches d'arbres, les fissures et les espaces entre les roches, ou encore sous les feuilles mortes, dans des creux ou dans des terriers creusés par leurs soins.

Réveil et réchauffement

La chaleur de la mi-journée

Ces tortues d'Hermann profitent des premiers rayons de soleil en se dressant contre le mur de leur enclos.
Mimi, en promenade
L'heure où les tortues, stimulées par l'augmentation de la température, se réveillent, dépend de l'habitat et des conditions météorologiques. Sur les pentes orientées au sud-est, recouvertes d'une végétation buissonnante, les tortues se réveillent avec les premiers rayons du soleil, quand celui-ci se lève. En forêt, où les rayons du matin, encore bas sur l'horizon, pénètrent à peine, les tortues commencent leur journée plus tard.
Au réveil, elles tournent sur elles-mêmes et inspectent les alentours. Dans le soleil du matin, elles cherchent à augmenter leur température corporelle jusqu'à la valeur idéale, juste au dessus de 30 °C. Le réchauffement étant plus rapide si les rayons solaires touchent le corps à angle droit, les tortues s'installent souvent presque verticalement, en s'appuyant sur des touffes d'herbe, des pierres ou des branches. Elles peuvent aussi se coucher sur des surfaces qui conservent la chaleur, comme les pierres ou le sable, étirant la tête et les pattes afin d'exposer la plus grande surface possible au soleil.
Une fois la température idéale atteinte - plus tôt en été, plus tard au printemps -, les tortues partent en quête de nourriture.
Au cours de la matinée, le soleil monte dans le ciel, les rayons réchauffent l'atmosphère, la température corporelle des tortues atteint ou dépasse 33 °C : maintenant, les tortues cherchent de l'ombre. Tout d'abord, elles ne protègent que leur tête, la carapace restant souvent exposée au soleil. Bientôt, il fait trop chaud et les animaux se réfugient dans des cachettes ou dans des abris nocturnes.
Les températures modérées et l'humidité plus élevée de ces refuges leur permettent de passer les heures les plus chaudes et de dépenser peu d'énergie.
Vers le soir, elles se réveillent à nouveau et sortent pour quelques heures; Elles profitent des derniers rayons du soleil pour se réchauffer, manger ou rechercher des partenaires sexuels.
Les heures où se déroulent ces différentes activités varient tout au long de l'année. Les jours nuageux, venteux ou pluvieux, où l'humidité atmosphérique est plus élevée, les tortues méditerranéennes ne quittent pas leur cachette ou ne s'activent qu'en fin de matinée.

Les Tortues au fil des saisons

Dans les régions tempérées telles que le Bassin Méditerranéen, le cycle annuel d'activité est principalement déterminé par les variations saisonnières des températures, avec des étés chauds et secs et des hivers froids et pluvieux. Celà concerne la Tortue Grecque et ses sous-espèces, la Tortue d'Hermann, la Tortue des Steppes, la Tortue Bordée ainsi que la Tortue Charbonnière qui vit au Paraguay.
Tortue Grecque
Tortue Bordée
Dans les régions subtropicales, plus chaudes et plus encore dans la ceinture équatoriale, l'activité est surtout influencée par les les variations d'humidité, c'est à dire par l'alternance de la saison sèche et de la saison des pluies. Les espèces concernées sont la Tortue étoilée d'Inde, la Tortue Léopard, la Tortue sillonnée et la Tortue à tête jaune.
Tortue étoilée
Tortue Léopard
Au printemps, dans le sud-est de l'Europe, les températures s'élèvent et dépassent 25 °C pendant plusieurs jours d'affilée, entre la fin mars et le début d'avril. Cela déclenche le réveil des tortues, qui sortent de leur engourdissement hivernal.
Juste après l'hibernation, déterminée par la durée du jour et la température, l'instinct de reproduction se réveille chez les mâles. A cette époque de l'année, ils parcourent de longues distances à la recherche de partenaires ; c'est pourquoi, on ne trouve pratiquement que des mâles en mars-avril.
Six à huit semaines plus tard, de fin mai à début juin, les femelles se déplacent à leur tour, mais pour une toute autre raison : elles recherchent des lieux à végétation basse ou éparse afin de pondre dans des sols bien exposés au soleil.

En été, les températures dépassent 35 °C pendant de longues périodes et les précipitations se font rares. Les tortues qui vivent dans les maquis, les savanes et les dunes, limitent leur activité au petit matin et au soir.
La tortue grecque et la tortue d'Egypte ne trouvent plus à se nourrir dès début juin et entrent en repos estival ou estivation.

En automne dans le Bassin Méditerranéen, le climat ressemble beaucoup à celui du printemps. Toutefois, la végétation est plus maigre et le régime des tortues change : les fruits, les baies et les champignons complètent le menu. Les premières pluies, qui ramollissent le sol sec, déclenchent l'éclosion des oeufs. A mesure que le ciel redescend sur l'horizon, les périodes d'activité se rapprochent de la mi-journée, à l'inverse du printemps. A la fin d'octobre ou en novembre, le temps est plus variable et les tortues passent les premières journées froides dans leurs cachettes. Durant les belles journées, elles s'exposent encore un peu au soleil mais ne s'alimentent presque plus. L'intestin est vidé et l'organisme réduit son activité : les tortues sentent la venue de l'hiver.

En hiver, les tortues du Nord du bassin Méditerranéen hivernent sous terre, à l'abri du gel, de la neige, de la pluie et des tempêtes : c'est la période d'hibernation.